Kristian GUYONVARC'H - Intervention de politique générale (oct. 2008)

Publié le par UDB - Bro an Alre

 
Session plénière des 23 et 24 octobre 2008


Groupe UDB-GA

 

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Monsieur le président, chers collègues,

 

Face à la crise financière américaine et à sa contagion en Europe comme ailleurs, Nicolas Sarkozy vient de garantir une caution au bénéfice des banques françaises de l’ordre de 360 milliards d’euros, 360 années du budget de notre Région. L’Etat rassure les investisseurs mais aussi les spéculateurs sur la capacité des banques à assurer leurs placements. Nous commencerons donc, Monsieur le Président, par constater que l’Etat intervient pour rétablir la confiance dans un système critiqué de tous ! Mais bon puisqu’il paraît, discours de Toulon oblige, que, je cite, « cette crise n’est pas la crise du capitalisme »…

 

Mais dans quel monde vivons-nous ? D’un côté l’Union européenne et les Etats-Unis viennent de garantir le système financier, leur système financier en mobilisant plus de 2.400 milliards d’euros. De l’autre, près d’un milliard d’êtres humains ne font que tenter de survivre jour après jour, alors que la FAO, l’organisation des Nations Unies en charge de l’agriculture et de l’alimentation, estime que sortir l’humanité de la famine et de la malnutrition demanderait 22 milliards d’euros par an. 22 milliards impossibles à réunir nous dit-on…

 

Il est clair que l’économie mondiale avait et a toujours largement les moyens de se réformer et de prendre enfin la voie du développement durable et solidaire tant vanté par les politiques. Cette crise est avant tout le résultat d’une absence générale de régulation et de contrôle, mais aussi d’une déterritorialisation de l’économie, en clair le résultat de la déréglementation économique prônée par l’Ecole de Chicago. Pour ces économistes qui confondent l’économie de marché et le casino, seul le rendement financier est important et l’Etat (ou quelque forme que ce soit d’intervention publique) n’a pas à intervenir dans un marché réputé pur et parfait. Or cette vision idyllique se prête à toutes les spéculations et encourage l’évasion fiscale. Les paradis fiscaux sont le produit du capitalisme financier.

 

A notre niveau, au niveau régional, le meilleur remède contre cette déterritorialisation est de compter avant tout sur nos propres forces. Non pas de manière autarcique mais en privilégiant l’économie de proximité, notre environnement et ses ressources qui sont autant d’atouts non délocalisables. C’est en retissant les liens entre économie et territoire qu’il sera possible de lutter contre les mouvements spéculatifs liés à la financiarisation du système économique capitaliste. Retisser les liens entre économie et territoires, c’est revenir à ce que d’aucuns appellent l’économie réelle.

 

A ce titre il est heureux, Monsieur le Président, que vous ayez invité le président du gouvernement de la communauté autonome du Pays basque à venir témoigner de l’expérience de sa région lors des Assises des territoires le 22 novembre prochain à Saint-Malo. Que nous apprend l’expérience du Pays basque où le taux de chômage a été réduit de 25 à 5% en 20 ans ? Que développement endogène et ouverture internationale sont non seulement compatibles mais complémentaires quand la priorité est donnée au facteur humain sur le capital.  Les « clusters », qui sont une mise en réseau des compétences, les Basques les pratiquent depuis plus de 15 ans.

 

Comme le Pays basque la Bretagne a la chance de disposer d’un réseau de pays historiques, des pays qui assurent les besoins fondamentaux des personnes qui y vivent. Pour garantir la pérennité de ces bassins de vie, les services publics doivent être forts partout sous peine de voir une métropolisation croissante (autour de Rennes, de Nantes et du littoral) et une désertification des territoires les plus fragiles, le Kreiz Breizh notamment.

Or, le gouvernement s’acharne, pour des raisons financières, à faire l’inverse : suppression d’hôpitaux, de postes, d’écoles, de tribunaux… Comment garantir le polycentrisme et le maillage des territoires si les besoins des personnes et des entreprises locales ne sont pas pris en compte ?

 

Peut-on agir sur une crise aussi profonde que celle que traverse la France, et qui avait débuté bien avant la plongée des marchés financiers américains, sans des institutions territorialisées elles aussi ? L’Etat, en enclenchant une réforme des collectivités, ouvre le débat. Le président de la république déclarait le 25 septembre que le moment était venu, je cite, de « poser la question des échelons de collectivités territoriales dont le nombre et l’enchevêtrement des compétences sont une source d’inefficacité et de dépenses supplémentaires ». Sur ce constat, le groupe UDB-GA ne peut qu’être d’accord, je dis bien sur le constat.

 

Pour nous, il est clair que le département est une structure dépassée. Non pas que ses élus et ses personnels soient moins qualifiés que les nôtres mais nous ne sommes plus au temps de la voiture à cheval qui avait guidé sa création et ses délimitations ; à l’ère d’internet ses missions pourraient être remplies par la Région ou les intercommunalités. Or, si l’on en croit les déclarations récentes d’Edouard Balladur que Nicolas Sarkozy a chargé hier d’une mission sur la réforme des collectivités il pourrait être question de fusionner les départements et les régions en transformant le Conseil régional en une sorte d’hydre interdépartementale. Pour le groupe UDB-GA ce serait une régression de 40 ans quand le Conseil régional n’était qu’une addition d’intérêts locaux ou catégoriels. Ce serait tuer la régionalisation encore bien timide que la France a amorcée il y a 25 ans.

 

D’autres rumeurs évoquent la fusion des Régions entre elles et là encore il faut se montrer inquiet quand aux volontés sous-jacentes. Dans d’autres fonctions François Fillon s’était révélé le promoteur le plus actif d’un « grand Ouest ». Cette chimère technocratique, en plus d’être incohérente, est une menace directe pour l’identité bretonne et la cohésion territoriale de la Bretagne.

 

Nous avons toujours demandé le redécoupage administratif de l’ouest de la France, mais sur des bases cohérentes culturellement, économiquement et socialement. La Normandie pourrait être réunifiée nous disent les rumeurs de couloir. L’Alsace aspire à n’avoir qu’une Région en y fondant ses deux départements. Nicolas Sarkozy laisse entendre que l’Ile de France ou le Grand Paris accéderait à une forme de statut particulier. Pourquoi la Bretagne n’aurait-elle pas le droit de faire valoir sa demande de réunification ?

 

Si nous comprenons qu’il faille entretenir des relations institutionnelles avec la région dite des Pays de la Loire car certains dossiers économiques ou celui du  transport ferroviaire n’attendront pas la réunification administrative de la Bretagne, pour autant nous pensons qu’il est temps de pousser plus loin nos revendications et d’agir en conséquence. Le succès de la manifestation de Nantes le 20 septembre avec ses 10.000 manifestants nous conforte dans l’idée que la Loire-Atlantique, comme le reste de la Bretagne, aspire à la réunification. Son président était d’ailleurs au nombre des manifestants.

 

Parce qu’on ne peut pas tout attendre de Paris et que la balle est aussi dans notre camp nous demandons à nos parlementaires bretons qu’ils prennent solidairement l’initiative d’une proposition de loi en faveur d’une consultation populaire sur la question de la réunification administrative de la Bretagne comme la Constitution le permet depuis 2003. Il revient aux citoyens de Loire-Atlantique d’une part et à ceux du reste de la Bretagne d’autre part de trancher la question par la voie démocratique des urnes. En fin de session, notre groupe soumettra à notre assemblée une motion en ce sens.


Publié dans Pays d'AURAY

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